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Blog Littéraire

Tralilou Lit

Catherine Poulain, Le grand marin, Points, 2017

Catherine Poulain, Le grand marin, Points, 2017

L'Alaska. Une femme qui part en mer, qui prend le large. Une femme dans un univers d'hommes.

Elle est plus fine, moins musclée, mais elle donne autant d'énergie que les hommes sur le pont. Surtout, ne pas montrer le moindre signe de faiblesse ou de fatigue. Elle souffre en silence, elle a parfois les larmes aux yeux de douleur ou d'humiliation, car les hommes ne mâchent par leurs mots. Ils sont gentils et patients avec elle, mais ils sont aussi très durs.

Elle est surnommée Lili-la-très-sauvage car elle ne se laisse pas approcher. Jusqu'au grand marin ...

Je suis invulnérable, je lui dis. Il hausse les épaules :
- Tu mourras comme tout le monde.
- Oui. Jusqu'à ma mort je suis invulnérable.

Catherine Poulain, Le grand marin, Points, 2017

Connaître des jours, des nuits, des aubes belles à en renier son passé, à y vendre son âme.

Catherine Poulain, Le grand marin, Points, 2017

C'est le récit d'une femme libre. On ne sait pas vraiment pourquoi, mais elle a besoin de partir à l'autre bout du monde, épuiser son corps, se battre, résister.

Embarquer, c'est comme épouser le bateau le temps que tu vas bosser pour lui. T'as plus de vie, t'as plus rien à toi. Tu dois obéissance au skipper. Même si c'est un con - il soupire. Je ne sais pas pourquoi j'y suis venu, il dit encore en hochant la tête, je ne sais pas ce qui fait que l'on veuille tant souffrir, pour rien au fond. Manquer de tout, de sommeil, de chaleur, d'amour aussi, il ajoute à mi-voix, jusqu'à n'en plus pouvoir, jusqu'à haïr le métier, et que malgré tout on en redemande, parce que le reste du monde vous semble fade, vous ennuie à en devenir fou.

Catherine Poulain, Le grand marin, Points, 2017

J'étais venue seule, de très très loin, je voudrais qu'un bateau m'adopte je murmurais dans le grand silence venteux de mes premières nuits, allongée sur le sol de la maison de bois, à regarder le ciel obscur [...].

Catherine Poulain, Le grand marin, Points, 2017

Il y a beaucoup de personnages. Les skippers, les hommes de l'équipage, mais aussi des autres bateaux et les hommes et femmes qui restent au port.

Les pauses en mer se ressemblent, elles ponctuent les journées et nuits comme des rituels : café, clope, rasade d'alcool, riz ; on ferme les yeux quelques instants avant de reprendre le travail.

Et puis il n'y a plus de jours ni de nuits, mais des heures qui s'égrènent, le ciel qui s'assombrit, l'obscurité qui recouvre l'océan, il faut alors rallumer les lumières du pont. Dormir ... Quelques fois on mange. Un petit déjeuner à quatre heures de l'après-midi, un déjeuner à onze heures du soir.

Catherine Poulain, Le grand marin, Points, 2017

L'alcool est très présent, il semble indispensable face à la dureté du métier et la force de la mer. Quand ils sont à terre, les marins "repeignent la ville en rouge", ils font la tournée des bars, se saoulent jusqu'à l'aube.

Un instant, il est redevenu le grand marin qui déployait ses épaules, gonflait sa poitrine, balançait ses reins puissants au rythme de la vague. Puis il s'est ramassé sur lui-même. Il a attrapé son verre qu'il a vidé d'une traite - en a redemandé un autre.

Catherine Poulain, Le grand marin, Points, 2017

Le grand marin, le deuxième personnage important de ce livre.

On est tombé nez à nez. Jude. Le grand marin. A nouveau il avait perdu sa belle fureur d'homme qui pêche, ses épaules étaient voûtées. Il allait d'un pas mal assuré comme en terre étrangère, incertain de sa marche et de sa direction, le visage écarlate, regard hésitant. Le lion des mers était redevenu ours.

Catherine Poulain, Le grand marin, Points, 2017

Il garde de sa vie de marin cet état de demi-veille, toujours. Nuits hachées. Il dort deux heures. Trois heures. Il se relève, prend une cigarette. Il marche un peu, fait le tour de la pièce, va s'asseoir devant le poste qu'il a rallumé doucement - ou face à la fenêtre. Il fume, attrape la bouteille sur la table de nuit. Il regarde. La lune - quand elle est là -, le ciel - toujours. La mer qu'il devine derrière les maisons.

Catherine Poulain, Le grand marin, Points, 2017

C'est extrêmement bien écrit. Le plume est précise et détaillée. Ça sent le poisson, la mer, l'humidité, la moisissure. Il y a aussi du sang : celui des poisson mais aussi celui des Hommes qui se blessent. Le vocabulaire marin est évidemment très présent : détails techniques sur le fonctionnement d'un bateau, subtilités de la météos, noms des poissons.

Le rythme est lent. J'ai eu besoin d'entrecouper ma lecture de ce roman par d'autres livres.

Si finalement, j'ai beaucoup aimé le personnage et le style d'écriture, ce n'est pas tout à fait un coup de cœur car j'ai trouvé que c'était assez répétitif. J'ai aussi malheureusement été déçue par la fin, qui selon moi n'est pas une ...

Mais je dois avouer que c'est un livre qui vaut le détour.

Pfff ! Vous êtes des milliers comme ça, qui arrivez depuis plus d'un siècle. Les premiers c'étaient des féroces. Vous c'est pas pareil. Vous êtes venus chercher quelque chose qui est impossible à trouver. Une sécurité ? Enfin non même pas puisque c'est la mort que vous avez l'air de chercher, ou en tout cas vouloir rencontrer. Vous cherchez ... une certitude peut-être ... Quelque chose qui serait assez fort pour combattre vos peurs, vos douleurs, votre passé - qui sauverait tout, vous en premier.

Catherine Poulain, Le grand marin, Points, 2017

On a eu les pionniers, puis des hors-la-loi qui cherchaient à se faire oublier. Aujourd'hui on a de tout : ceux qui fuient un drame ou une saloperie qu'ils ont faite. Pour finir, on se coltine tous les révoltés, tous les tordus de la planète qui veulent recommencer une nouvelle vie. Et les rêveurs aussi, comme toi.

Catherine Poulain, Le grand marin, Points, 2017

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