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Blog Littéraire

Tralilou Lit

Laurence Vilaine, La géante, Zulma, 2020

Laurence Vilaine, La géante, Zulma, 2020

Noële vit au pied de la Géante, avec son frère Rimbaud. La montagne pour seule mère et amie. Elle connaît tout des plantes qui poussent sur ses flans, elle en fait des tisanes et des onguents pour soigner les autres. Elle est un peu sorcière.

Sa vie s'écoule lentement, simple et rugueuse, jusqu'au jour où un journaliste mal en point, Maxim, s'installe près de chez elle pour s'isoler.

Le facteur qui la croise lui demande si elle peut lui apporter son courrier. Dès lors, avant de les lui remettre, elle lit chacune des lettres qui lui sont destinées. Et il ne répond jamais.

Elle découvre l'amour, le désir et le manque à travers les mots d'une autre. Elle se découvre autrement.

[...] j'ai parlé au soleil en le regardant. Je lui ai fait promettre d'être là chaque matin et je lui ai promis que j'y serais, que je reviendrais pour son lever, sbrigati, je voulais encore respirer le fond du ciel, j'ai promis, à genoux, promis que je reviendrais, et j'ai remis la hotte sur mon dos [...] Le chemin du retour, je l'ai dévalé comme un lièvre, les branches brinquebalaient et j'en perdais en chemin, celles que je serrais dans mes bras me griffaient le visage et mes yeux pleuraient à cause du vent ou peut-être à cause de la vie qui m'attendait sans pourtant rien en savoir [...]

Laurence Vilaine, La géante, Zulma

Pour ceux qui me connaissent un peu, la montagne est un motif que j'aime beaucoup retrouver en littérature alors ce n'est pas une surprise si je dis que ce livre me tentait beaucoup. Et c'est un coup de coeur ! Il nous parle de montagne, de promesse, de renaissance, d'amour et d'écriture.

La Géante est omniprésente dans le roman, elle en est le personnage principal : ses odeurs, ses bruits, son ombre sont toujours là. Elle accompagne Noële depuis la mort de sa mère, quand elle avait 7 ans, et détient son plus grand secret ... Elle est aussi le décor devant les yeux de Maxim et celui gravi par la mystérieuse "femme qui monte".

Noële n'est pas un personnage facile, qu'on apprécie au premier chapitre. On la découvre, on l'apprivoise, on s'y attache au fil des pages, au fur et à mesure de son éclosion.
J'ai aimé son paradoxe : c'est vrai, elle lit en secret les lettres qu'elle transmet à Maxim, mais elle l'approche aussi en respectant sa pudeur, sa solitude et son rythme.

Je ne peux pas trop en dire sur l'histoire de Maxim pour ne pas divulgacher mais c'est un personnage très intéressant.

Enfin, si Rimbaud est peu présent, il a toute son importance et je l'ai beaucoup aimé.

Au début j'ai eu du mal à comprendre l'histoire car une première narration était entrecoupée de deux autres. Effet étrange et déroutant. Mais tout doucement, l'autrice arrive à faire se rejoindre les trois "temps" et les liens se font sous nos yeux pour notre plus grand plaisir.

Surtout, elle nous montre à quel point on peut être touché par des mots qui ne nous sont pas destinés. À mon sens, c'est là que réside toute la beauté de ce livre. D'ailleurs, j'ai adoré l'écriture .... Son style poétique m'a complètement séduite ! J'espère le retrouver dans de futures publications.

[...] pour ce qui est de la Géante, je suis prête à jurer qu'elle a frémi sous mes pieds.
On n'en serait pas là si, comme d'habitude, Rimbaud était monté à la rivière.

Laurence Vilaine, La géante, Zulma

Il marche toute la nuit, et à l'aube il s'assoit pour contempler sa récolte, seulement quelques pépites, parfois une bonne dizaine qu'il dispose en rond dans sa paume. Il les remet ensuite à l'eau une à une et pour s'excuser de les avoir dérangées, avant de repartir il tient compagnie à la rivière qui, de temps en temps, et c'est pour ça le sac à sa ceinture, lui donne quelques pierres en cadeaux.

Laurence Vilaine, La géante, Zulma

On est en bonne santé, on tient debout, et on marche pour cracher la violence du monde, mais pour qui on se prend pour croire qu'on y arrivera ?

Laurence Vilaine, La géante, Zulma

Il me tarde de retrouver nos messages à pas d'heure, nos baisers toutes les heures, mais j'aime aussi ces lettres qui prennent leur temps.

Laurence Vilaine, La géante, Zulma

La Madone, toujours, met du bois sur ma route pour que je le ramasse.

Laurence Vilaine, La géante, Zulma

Monter, c'était combattre. Et atteindre le sommet, c'était gagner la guerre.

Laurence Vilaine, La géante, Zulma

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