Céline Chevet, La fille qui tressait les nuages, Le Chat Noir, 2018

Julian pleure son amour perdu : la sœur de son ami Souichiro Sakai. Elle est mystérieusement morte il y a deux ans, et il ne se souvient plus dans quelles circonstances.

Ses amies Haru, la fille qui tresse les nuages, et Akiko, celle qui passe inaperçue, tentent de l'aider : à se souvenir et à avancer.

Mais Souichiro, lui, garde le silence ... Et l'histoire de la famille Sakai révèle peu à peu une horrible malédiction.

Tel un pacte, nos silences dans le vent, notre culpabilité malmenée par les embruns, le pardon entre nos paumes, nous avions scellé ce qui devait l'être.

Céline Chevet, La fille qui tressait les nuages, Le Chat Noir

C'est un livre que je voulais lire depuis longtemps : j'en avais entendu beaucoup de bien, l'histoire m'intriguait et la couverture me faisait de l'œil ... Attention cependant, cette couverture douce aux couleurs pastels est assez trompeuse !

Ce n'est pas un coup de cœur mais ce roman restera vraiment marquant dans mon parcours de lectrice.

Ce que j'ai beaucoup aimé, c'est l'aspect onirique. Au fil des pages, on rencontre une fille qui tresse les nuages, des pièces de monnaies qui s'envolent, une collection de sucres en morceaux... Des éléments jolis et originaux, portés par une écriture poétique, dans de beaux décors japonais. Les éléments surréalistes, magiques, se mêlent à la folie de certains personnages : c'est une histoire fantastique, au sens premier du terme, un conte, une fable.

Je dois aussi saluer la profondeur psychologique des personnages ... ! L'autrice décrit avec brio la difficulté à faire son deuil, l'amour non réciproque, le sentiment de culpabilité, l'impression de trahir un ami ... Si Akiko n'est qu'un personnage "secondaire", elle m'a beaucoup touchée.

Enfin, l'autrice manie très bien toutes les ficelles de la narration : il y a une histoire dans l'histoire, des retours dans le passé, et surtout j'ai été surprise deux fois (et la deuxième fois a été accompagnée d'un vrai "oh p*tain ! C'est pas possible ! " de ma part, tellement le choc était grand).

Pourquoi n'est ce pas un coup de cœur alors ... ? J'ai eu du mal à avancer, à m'y remettre, tout simplement parce que c'est un livre très sombre, violent, qui évoque la mort, le viol, la malédiction, la folie. Paradoxalement, la poésie se même à la cruauté, ce qui en fait un livre assez dérangeant pour le lecteur. Pour être honnête, je suis peut-être aussi trop sensible pour ce genre d'histoire :)

Bref, c'est un très bon roman ; mais si vous l'avez dans votre PAL, attendez d'avoir le moral au beau fixe pour le commencer et attendez-vous à vivre quelque chose de très spécial ... !

Je voulais tenir sa main. Je voulais entendre son rire, car seul son rire, désormais, était en mesure de combler le vide qui me rongeait le cœur. Alors, j’appelais son nom, doucement, passionnément puis je le criais, je le grognais, je le pleurais jusqu’à en écorcher chaque lettre.

Céline Chevet, La fille qui tressait les nuages, Le Chat Noir

Finalement, le temps déchire les âmes comme le vent étire les nuages jusqu’à ce qu’ils ne soient plus que des lambeaux. C’est pour ça que j’aime les tresser, j’ai l’impression de les rendre plus robustes aux aléas du temps. J’ai tort ?

Céline Chevet, La fille qui tressait les nuages, Le Chat Noir