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Blog Littéraire

Tralilou Lit

Ingrid Thobois, Miss Sarajevo, Buchet-Chastel, 2018

Ingrid Thobois, Miss Sarajevo, Buchet-Chastel, 2018

C'est l'histoire de Joachim, la quarantaine, photographe de guerre, seul et solitaire, dont la peur du vide passe inaperçue. Pourtant, elle prend racine dans un drame familial qu'il a vécu enfant ...

Il vient de perdre son père, dernier membre de sa famille, avec qui il n'a pas parlé depuis environ 20 ans. Dans le train, sur le chemin Paris-Rouen, entre son studio et l'appartement de son enfance, Joachim se remémore les souvenirs : d'une part, sa famille, où le silence et les non-dits sont omniprésents depuis la mort de sa sœur ; d'autres parts, son départ pour Sarajevo, à 20 ans à peine, dans les années 90, en pleine guerre de Bosnie, d'où il reviendra sans avoir pris de photos.

L'imminence du départ, ce spasme entre la certitude d'un quai et le doute d'une destination, déstabilise un grand nombre de voyageurs. On a beau avoir lu les panneaux d'affichage, vérifié les écrans, rien n'y fait : le parallélisme des quais et des trains semble une invite à se tromper de voie, à se tromper de vie.

Ingrid Thobois, Miss Sarajevo, Buchet-Chastel, 2018

C'est un énorme coup de cœur ...

Le roman s'appelle Miss Sarajevo en référence à un fait réel : un concours de beauté qui a eu lieu durant le siège de Sarajevo, acte de résistance ultime face à la mort, à la guerre, aux bombardements et aux tirs des snipers. Il s'agissait de se prouver à soi et aux autres que la vie continuait et que l'espoir était toujours là que le massacre s'arrête.

Cette lecture poignante m'a réellement bouleversée tant sur le fond que sur la forme.

L'écriture est sublime : j'ai lu les 100 dernières pages à voix haute (toute seule chez moi) pour en profiter pleinement !

Il pense aux rues de Sarajevo qui l'attendent, demain. Il pense à la manière dont Zladko et lui s'enfoncent chaque jour dans le paysage de la guerre. Leurs trajectoires dessinent une série de boucles qui reviennent sur elles-mêmes. On met des heures à gagner un endroit situé à moins de cent mètres à vol d'oiseau - quels oiseaux ? A la très grande profondeur du chaos, le sang déserte les membres pour refluer vers les organes vitaux. Pieds et mains gelés. Surtout ne pas penser. Penser, c'est chuter. Chuter, c'est mourir.

Ingrid Thobois, Miss Sarajevo, Buchet-Chastel, 2018

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