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Blog Littéraire

Tralilou Lit

Fabrice Caro, Le discours, Gallimard, 2018

Fabrice Caro, Le discours, Gallimard, 2018

Au cours d'un repas de famille dominical, Adrien, la quarantaine, attend désespérément une réponse au sms qu'il a envoyé à son ex. Dialogues et réflexions intérieures sont entrecoupés d'ébauches de discours qu'il imagine faire au mariage de sa sœur, à la demande de son futur beau-frère, alors qu'il n'en a pas du tout envie. Tout à tour honnête, drôle, amer, acide, toujours absurdes, les discours s'écrivent dans sa tête ...

Et je réalise tout à coup l’incongruité de ma ponctuation : pourquoi un point d’exclamation à la fin de bisous ? Pourquoi cet emballement soudain ? Ce point d’exclamation délivre un message inverse à celui souhaité : ce point d’exclamation est une demande, une supplique, un cri de douleur, il mendie une réponse, il quémande de l’amour, c’est de la ponctuation de genou à terre, il hurle Sonia, bordel, qu’est ce que tu fous ! Réponds-moi ! Tu vois pas que je suis malade de chagrin, que je n’y arrive pas sans toi, que tout est vide et fade et sans le moindre sens. Il se veut festif et léger mais il n’est que larmoyant et inquiet.

Fabrice Caro, Le discours, Gallimard, 2018

J'ai adoré ce roman de Fabrice Caro, plus connu sous le nom de Fabcaro, auteur de la bande dessinée Zaï Zaï Zaï Zaï.

Adrien est un personnage auquel on s'identifie facilement. Il doute beaucoup, s'en veut d'avoir envoyé un sms à Sonia (avec qui il est "en pause"), se demande comment il sera interprété, imagine tout un tas de scénarios. Il est un peu perdu, un peu timide, n'ose pas dire non. Et pourtant, il a plein de choses à dire ... 

Les situations familiales qu'il décrit sont drôlissimes et font écho à ce que chacun d'entre nous a pu vivre avec son père, sa mère, son frère ou sa sœur.

J'ai beaucoup ri, pour autant, c'est aussi assez mélancolique et émouvant. Nous découvrons le parcours sentimental d'Adrien petit à petit, anecdote après anecdote, et il devient touchant. Ses réflexions sur le célibat, sans en avoir l'air, sont fortes et disent beaucoup de notre société où, lorsque l'on ne forme pas un couple, on est souvent perçu comme une "moitié d'entité".

Cette lecture était très agréable et m'a fait un bien fou ! J'ai complètement accroché avec le style de l'auteur, la justesse de son ton. J'ai eu le sourire aux lèvres de la première à la dernière page.

C'est un livre que je relirai sans doute pour le plaisir, et que je vous conseille !

La descente du « Mon cœur d’amour » à Adrien est une piste noire verglacée qu’on descend sur les fesses, sans pouvoir rien faire d’autre qu’attendre d’être en bas, passif et résigné.

Fabrice Caro, Le discours, Gallimard, 2018

L’année de mes trente ans, j’ai sombré dans une profonde dépression. Un chagrin d’amour, un de plus. J’étais revenu passer quelques jours chez mes parents, j’avais besoin de repli fœtal, de retour aux sources, quand bien même je n’avais plus rien de commun avec la source. Je me souviens qu’un soir, pendant que ma mère préparait le repas, debout dans la cuisine, j’avais essayé de lui parler de mon mal, la dépression, sans l’affoler, mais sans l’épargner non plus, j’avais besoin de partager ça avec elle, lui dire à quel point j’étais rongé, à quel point j’en souffrais, ce à quoi elle avait répondu : Tu dois boire du jus d’orange. Voilà. C’était ça la solution de ma mère, boire du jus d’orange.

Fabrice Caro, Le discours, Gallimard, 2018

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